Conscrits de
l'année 1809, les cousins Boniface Knobloch et François
Brigel doivent quitter
leur village de la plaine d’Alsace qui les a vus naître.
L’administration
impériale venait de leur signifier manu militari qu’on avait
besoins d’eux. Ils partirent donc, le cœur
serré pour aller
servir la patrie loin de chez eux.
Armée d’Allemagne,
première campagne en Autriche et puis de victoires en
sacrifices, toujours plus
loin jusqu’aux confins de l’Europe…. Parviendront-ils à
surmonter toutes les
épreuves et revoir leur chère Alsace ?
« Monsieur le
Président,
Confiant dans l’appel que vous avez bien
voulu faire aux vieux débris de l’Empire, pour les
rémunérer des services
qu’ils ont rendus à la Patrie et pour lesquels ils n’ont
reçu aucune
récompense, je soussigné Brigel François,
cordonnier à Diebolsheim, ancien soldat
et brigadier du 20e chasseurs à cheval, viens prendre
la liberté de
vous exposer les droits et titres qui peuvent me recommander à
votre
bienveillante sollicitude. »
Ce livre
n’est pas un roman. Tous les faits racontés, toutes les
citations son véridiques
et issus de témoins oculaires. Dans sa sélection des
sources, L’auteur s’est
attaché à toujours privilégier les
témoignages de ceux qui étaient au plus près
de l’action, ceux dont le récit authentique et brut fait vibrer
en quelques
mots car c’était un temps où vivaient encore des
héros ….
« Le 14, jour de la
bataille de Raab,
La division Montbrun dont faisait partie la brigade Colbert, avait
reçu l’ordre
d’enfoncer l’extrême droite de l’ennemi en le tournant. La
brigade Colbert fut
forcée de charger à travers un défilé
étroit où le 20e chasseurs
perdit beaucoup de monde sous la canonnade notamment le capitaine
Capitan et le
sous-lieutenant Henri. Après avoir été
amputé et juste avant d’expirer, Henri
déclara à un camarade : « Adieu,
maréchal des logis, je vous remercie
de vos bons soins, faites mes amitiés à tous mes
camarades présents et absents.
Dites-leur bien que je suis content de moi, car j’ai envisagé la
mort sans
pâlir. » C’était comme ça que mourait un
chasseur. Henri s’était illustré
au régiment dès l’âge de 15 ans alors qu’il
n’était encore que trompette. A
cette époque, il captura un jour seul un dragon autrichien.
Lorsqu’il revint au
camp, le dragon, honteux, déclara qu’il avait
déserté et n’avait pas été
capturé. Henri déclara alors :
« Très bien, qu’on lui rende ses
armes. Je vais le capturer une seconde fois puisque la première
n’a pas
compté ! » »
Un temps
où des soldats légendaire arrivèrent
jusqu’à Moscou d’où ils s’en retournèrent
chargés comme des rois….
« Ainsi, sous un soleil
radieux
d’automne russe l’immense colonne s’ébranla vers le sud. En plus
des soldats,
et de leurs convois d’équipement, de vivres, de munitions et de
blessés,
environ 40.000 civils à bord de presque autant de
véhicules fuyaient également
la capitale et se mêlaient aux troupes, chargés de tout ce
qu’ils avaient pu
emporter. Les soldats eux-mêmes s’étaient encombrés
de ce qu’ils avaient amassé
en un mois de pillage. Ils portaient de l’argenterie, des objets en or,
des
fourrures, et même des livres. Beaucoup avaient sacrifiés
jusqu’à une partie de
leur équipement pour emporter plus de butin et ces hommes qui
marchaient
apparemment sans ordre ou discipline ressemblaient plus à une
tribu barbare
qu’à une armée en campagne. Ségur comparait cette
armée à une horde tartare,
d’autres officiers la comparaient à celles des Romains, des
Grecs ou des Perses
qui rentraient de leurs expéditions chargés de butin.
Enfin d’autres plus
prosaïques, n’y voyaient qu’un carnaval ou une mascarade.
Certaines Moscovites
qui avaient choisi de suivre l’armée française quittaient
leur capitale «
habillées comme des bourgeoises parisiennes allant à un
pique-nique au bois de
Vincennes ou Romainville » ».
Les
témoignages les plus précieux, mais aussi les plus rares,
sont ceux des
sans-grades ou des jeunes officiers qui vivaient les émotions et
les
souffrances de l’armée dans leur chair. C’est en lisant leur
témoignage que le
lecteur prend tout la mesure de l’expérience qu’ils ont
vécue…
« Au milieu de cette
foule de visages
uniformes on ne reconnaissait plus celui qui marchait ici, là,
ou à côté de
soi. Il n’y avait plus qu’une chose qui importait : marcher, marcher
toujours
et survivre. Sur les visages de chacun les noms s’étaient
effacés pour faire
place, partout, à l’ombre de la mort. C’est ainsi qu’on approcha
doucement de
la Bérézina, nouvelle épreuve sur le chemin de
l’armée en déroute. Le 24 au
soir des éléments de la division Compans
arrivèrent enfin à Bobr. C’est là que
Gardier qui avait quitté Moscou avec un convoi de blessés
le 18 octobre
retrouva son colonel du 111e qu’il eut peine à reconnaître
: « Ils sont à peine
reconnaissables, leur teint livide, leur longue barbe avec des yeux
hagards et
toute leur personne couverte d’un enduit de crasse et de
poussière leur donne
assez l’air de malheureux naufragés qui auraient erré
quelque temps, privés de
nourriture et de tous les premiers besoins de la vie sur des rives
désertes. La
première demande qu’ils nous font est de nous prier de leur
donner à manger et
les aliments en assez grande quantité qu’on leur apporte, ne
servent qu’à
exciter leur insatiable appétit. » »
Il aura
fallu un an de recherches à l’auteur pour réunir les
éléments de cette fresque
militaire qui court sur six années de l’époque
impériale. Une autre année fut
nécessaire pour la sélection et la confrontation des
sources ainsi que pour
l’écriture.