Vicissitudes MilitairesVicissitudes Militaires

1809-1959


Sept générations de conscrits d’une famille alsacienne aux armées de cinq empires

   
Tome premier - Grandeur et déchéance 1809-1815

   

    Conscrits de l'année 1809, les cousins Boniface Knobloch et François Brigel doivent quitter leur village de la plaine d’Alsace qui les a vus naître. L’administration impériale venait de leur signifier manu militari qu’on avait besoins d’eux.  Ils partirent donc, le cœur serré pour aller servir la patrie loin de chez eux.


    Armée d’Allemagne, première campagne en Autriche et puis de victoires en sacrifices, toujours plus loin jusqu’aux confins de l’Europe…. Parviendront-ils à surmonter toutes les épreuves et revoir leur chère Alsace ?


 

« Monsieur le Président,
Confiant dans l’appel que vous avez bien voulu faire aux vieux débris de l’Empire, pour les rémunérer des services qu’ils ont rendus à la Patrie et pour lesquels ils n’ont reçu aucune récompense, je soussigné Brigel François, cordonnier à Diebolsheim, ancien soldat et brigadier du 20e chasseurs à cheval, viens prendre la liberté de vous exposer les droits et titres qui peuvent me recommander à votre bienveillante sollicitude. »

 

Ce livre n’est pas un roman. Tous les faits racontés, toutes les citations son véridiques et issus de témoins oculaires. Dans sa sélection des sources, L’auteur s’est attaché à toujours privilégier les témoignages de ceux qui étaient au plus près de l’action, ceux dont le récit authentique et brut fait vibrer en quelques mots car c’était un temps où vivaient encore des héros ….

 

« Le 14, jour de la bataille de Raab, La division Montbrun dont faisait partie la brigade Colbert, avait reçu l’ordre d’enfoncer l’extrême droite de l’ennemi en le tournant. La brigade Colbert fut forcée de charger à travers un défilé étroit où le 20e chasseurs perdit beaucoup de monde sous la canonnade notamment le capitaine Capitan et le sous-lieutenant Henri. Après avoir été amputé et juste avant d’expirer, Henri déclara à un camarade : « Adieu, maréchal des logis, je vous remercie de vos bons soins, faites mes amitiés à tous mes camarades présents et absents. Dites-leur bien que je suis content de moi, car j’ai envisagé la mort sans pâlir. » C’était comme ça que mourait un chasseur. Henri s’était illustré au régiment dès l’âge de 15 ans alors qu’il n’était encore que trompette. A cette époque, il captura un jour seul un dragon autrichien. Lorsqu’il revint au camp, le dragon, honteux, déclara qu’il avait déserté et n’avait pas été capturé. Henri déclara alors : « Très bien, qu’on lui rende ses armes. Je vais le capturer une seconde fois puisque la première n’a pas compté ! » »

 

Un temps où des soldats légendaire arrivèrent jusqu’à Moscou d’où ils s’en retournèrent chargés comme des rois….

 

« Ainsi, sous un soleil radieux d’automne russe l’immense colonne s’ébranla vers le sud. En plus des soldats, et de leurs convois d’équipement, de vivres, de munitions et de blessés, environ 40.000 civils à bord de presque autant de véhicules fuyaient également la capitale et se mêlaient aux troupes, chargés de tout ce qu’ils avaient pu emporter. Les soldats eux-mêmes s’étaient encombrés de ce qu’ils avaient amassé en un mois de pillage. Ils portaient de l’argenterie, des objets en or, des fourrures, et même des livres. Beaucoup avaient sacrifiés jusqu’à une partie de leur équipement pour emporter plus de butin et ces hommes qui marchaient apparemment sans ordre ou discipline ressemblaient plus à une tribu barbare qu’à une armée en campagne. Ségur comparait cette armée à une horde tartare, d’autres officiers la comparaient à celles des Romains, des Grecs ou des Perses qui rentraient de leurs expéditions chargés de butin. Enfin d’autres plus prosaïques, n’y voyaient qu’un carnaval ou une mascarade. Certaines Moscovites qui avaient choisi de suivre l’armée française quittaient leur capitale « habillées comme des bourgeoises parisiennes allant à un pique-nique au bois de Vincennes ou Romainville » ».

 

Les témoignages les plus précieux, mais aussi les plus rares, sont ceux des sans-grades ou des jeunes officiers qui vivaient les émotions et les souffrances de l’armée dans leur chair. C’est en lisant leur témoignage que le lecteur prend tout la mesure de l’expérience qu’ils ont vécue…

 

« Au milieu de cette foule de visages uniformes on ne reconnaissait plus celui qui marchait ici, là, ou à côté de soi. Il n’y avait plus qu’une chose qui importait : marcher, marcher toujours et survivre. Sur les visages de chacun les noms s’étaient effacés pour faire place, partout, à l’ombre de la mort. C’est ainsi qu’on approcha doucement de la Bérézina, nouvelle épreuve sur le chemin de l’armée en déroute. Le 24 au soir des éléments de la division Compans arrivèrent enfin à Bobr. C’est là que Gardier qui avait quitté Moscou avec un convoi de blessés le 18 octobre retrouva son colonel du 111e qu’il eut peine à reconnaître : « Ils sont à peine reconnaissables, leur teint livide, leur longue barbe avec des yeux hagards et toute leur personne couverte d’un enduit de crasse et de poussière leur donne assez l’air de malheureux naufragés qui auraient erré quelque temps, privés de nourriture et de tous les premiers besoins de la vie sur des rives désertes. La première demande qu’ils nous font est de nous prier de leur donner à manger et les aliments en assez grande quantité qu’on leur apporte, ne servent qu’à exciter leur insatiable appétit. » »

 

Il aura fallu un an de recherches à l’auteur pour réunir les éléments de cette fresque militaire qui court sur six années de l’époque impériale. Une autre année fut nécessaire pour la sélection et la confrontation des sources ainsi que pour l’écriture.